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Seuls les juges sont fondés à déterminer si les pièces demandées par l'expert-comptable dans le cadre de sa mission légale auprès du comité d'entreprise son utiles ou non...

Les faits

Un comité d'entreprise, par une délibération du 25 avril 2013, nomme un cabinet d'expertise comptable afin de l'assister en vue de l'examen annuel des comptes 2012 et du budget prévisionnel 2013. Or, en janvier 2014, le CE et le cabinet son contraints d'assigner l'employeur devant le président du tribunal de grande instance afin d'obtenir en référé la communication de l'ensemble des pièces qu'ils estiment utiles à l'exercice de la mission.

Il s'agit plus précisément des éléments permettant à l'expert d'analyser les politiques de rémunérations des salariés comme le CE le lui a demandé. L'expert demande donc à recevoir les rubriques de paie 2012 ainsi qu'un extrait du fichier du personnel comportant les renseignements suivants : le matricule, l'établissement de rattachement, le sexe, l'âge, l'ancienneté, le coefficient actuel et le coefficient à l'embauche, la fonction, la convention collective de référence, le temps de travail, le salaire de base brut équivalent temps plein, les heures complémentaires et supplémentaires et leurs valorisations, l'existence ou non d'un 13ème mois, les diverses primes versées et le pourcentage d'évolution s'il a été calculé.

Mais d'après l'employeur, l'expert-comptable dispose déjà des documents suffisants à cette analyse avec notamment le bilan social. Il estime que les éléments complémentaires demandés sont inutiles et refuse par conséquent de les communiquer.

Ce qu'en pensent les juges

Les juges rappellent les principes suivants, basés sur le code du travail et la jurisprudence :

- la mission de l'expert porte sur tous les éléments d'ordre économique, financier ou social nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise (article L. 2325-36 du code du travail) ;

- l'expert-comptable a accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes, il appartient à ce seul expert, désigné en vue de l'examen annuel des comptes, de déterminer les documents qu'il juge utiles d'examiner (article L. 2325-37 du code du travail), à la condition toutefois que sa demande soit conforme à sa mission, c'est-à-dire que les documents demandés soient nécessaires à la compréhension des comptes et à l'appréciation de la situation de l'entreprise ;

- l'expert-comptable ne peut exiger la production de documents qui n'existent pas et dont l'établissement n'est pas obligatoire, tout comme il ne peut exiger la production de données ou informations que l'employeur ne possède pas.

Or, dans cette affaire, les informations sollicitées par l'expert et concernant des éléments de rémunération des salariés existent puisqu'elles avaient déjà été transmises, sans aucune réserve, les trois années précédentes toujours pour la mission d'examen annuel des comptes de la société. De plus, il n'est pas demandé à l'entreprise de produire un document spécifique mais d'extraire de ses bases de données du personnel les éléments demandés et de les transmettre au cabinet d'expertise comptable (soumis bien sûr à une obligation légale de secret et de discrétion).

Dans ces circonstances, les juges concluent donc que "l'employeur ne peut se borner à conclure à l'inutilité des documents demandés, sans offrir de laisser à l'expert l'accès aux bases de données relatives au personnel afin qu'il procède lui-même à l'extraction des éléments qu'il estime utiles à l'exercice de sa mission". Les juges précisent par ailleurs que le "refus de l'employeur de communiquer un document sollicité ne caractérise un trouble manifestement illicite que si le juge des référés vérifie et constate la nécessité de ce document au regard de la mission confiée". Document utile ou pas à la mission de l'expert, seuls les juges peuvent trancher.

Enfin, soulignons aussi que dans cette affaire, le refus de l'employeur de collaborer avait principalement pour objectif de mettre un frein au déroulement de la mission...

Cour de cassation, Chambre sociale, 9 novembre 2016, n° 15-16879.

 

 

 

 

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