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L'annonce du déménagement de l'entreprise pose souvent problème aux salariés. En fait, tout dépend de la manière dont ce déménagement va être préparé, de l'implication de l'employeur et de ses relations avec les différentes instances représentatives du personnel concernées par le projet, notamment le CE et le CHSCT. Le rôle de ces deux IRP est incontestablement déterminant dans le bon déroulement et la réussite d'un déménagement.

 

 

L'entreprise déménage : les IRP doivent être consultées

Dans un projet de déménagement, on peut attendre de la part de l'employeur qu'il fasse preuve de la plus grande transparence. Il arrive toutefois que certains chefs d'entreprise omettent d'aborder le sujet avec leurs représentants du personnel, les plaçant ainsi, du jour au lendemain, devant le fait accompli. Dans ce cas-là, ce à quoi l'employeur n'a pas pensé en voulant éviter de s'embarrasser des avis du CE et du CHSCT, c'est au retour de bâton. Car bien évidemment, le code du travail a quelques textes en réserve. Un déménagement n'étant pas un événement anodin, l'employeur est tenu d'informer et de consulter les représentants du personnel. On s'en référera aux articles L. 2323-1 du code du travail pour le comité d'entreprise et L. 4612-8-1 pour le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

Que disent ces articles ?

  • L'article L. 2323-1 stipule que le comité d'entreprise est informé et consulté sur les questions intéressant les conditions d'emploi et de travail.
  • L'article L. 4612-8-1 stipule que le CHSCT "est consulté avant toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail et, notamment, avant toute transformation importante des postes de travail découlant de la modification de l'outillage, d'un changement de produit ou de l'organisation du travail, avant toute modification des cadences et des normes de productivité liées ou non à la rémunération du travail".

L'entreprise déménage : les conditions et l'organisation du travail des salariés sont-elles impactées ?

Le déménagement d'une entreprise est un projet important qui a forcément des répercussions sur les conditions et l'organisation du travail des salariés. Un tel événement peut par ailleurs se révéler source d'inquiétudes pour eux car il impacte non seulement la vie professionnelle mais peut également porter atteinte à la vie personnelle. L'employeur qui négligerait ou contournerait la procédure d'information/consultation du CE et du CHSCT s'expose à la suspension de la mise en oeuvre de son projet (si les informations fournies sont incomplètes) ou à une action sur le fondement du délit d'entrave (si la procédure n'est pas respectée).

La jurisprudence récente

C'est d'ailleurs arrivé très récemment à un employeur qui a cru bon de lancer la procédure d'information/consultation du CE seulement après avoir dénoncé le bail de ses locaux et conclu un nouveau bail pour transférer les salariés. Pour la cour de cassation, une telle attitude est constitutive d'un délit d'entrave (Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 mars 2016, n° 14-85-078) ; elle rappelle, en se basant sur l'article L. 2323-2, que "les décisions de l'employeur sont précédées de la consultation du comité d'entreprise".

La procédure d'information/consultation

La consultation des IRP consiste pour l'employeur à présenter le projet de déménagement avec toutes les informations et indications nécessaires quant à ses conséquences positives et négatives sur les conditions de travail des salariés. L'importance d'un projet de déménagement ne se mesure pas nécessairement par le nombre de salariés concernés par le transfert mais plutôt par ses effets sur l'organisation et les conditions de travail. Il relève donc du comité d'entreprise et du CHSCT de :

- veiller à ce que des informations complètes, détaillées et compréhensibles relatives à l'opération leur soient communiquées ;

- prévenir les risques liés au déménagement (notamment anticiper le stress au travail) ;

- se mettre en position pour peser sur le projet et obtenir des compensations.

Lorsque ces deux institutions coexistent au sein de l'entreprise, elles travaillent de concert à la réussite du projet de déménagement, chacune ayant toutefois une action bien spécifique.

L'entreprise déménage : quel rôle pour les représentants du personnel ?

Le rôle du comité d'entreprise

Le comité d'entreprise va davantage être concerné par le volet économique du projet de déménagement. Ce qui l'intéresse ? Les économies et les coûts engendrés par le projet, mais surtout les économies ! Pour les évaluer, le CE peut faire appel à un expert libre rémunérés avec ses propres deniers (article L. 2325-41 du code du travail). Grâce à cette expertise, le comité sera en mesure de mettre en avant auprès de l'employeur les économies réalisées par l'entreprise et ainsi demander des mesures de compensation ou d'amélioration du projet (en collaboration avec le CHSCT).

Le rôle du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail

Le CHSCT doit être consulté sur deux grandes phases du projet : le déménagement et l'aménagement.

Concernant le déménagement...

Pour le déménagement, le CHSCT devra s'impliquer dans le choix du nouveau site de travail et notamment s'interroger sur la question de la mobilité géographique pour les salariés. C'est cette question de mobilité qui en premier lieu peut être prise comme une mauvaise nouvelle. Le temps de trajet domicile-travail va-t-il être allongé et surtout est-il facilement accessible (en voiture avec facilité de stationnement et par les transports en commun) ? Quel impact ces nouvelles contraintes de temps et de coût du trajet vont-elles avoir sur la vie privée des salariés ? Le CHSCT devra donc se pencher sur les mesures prévues pour l'aide à la mobilité et s'atteler à la négociation de mesures d'amélioration ou de compensation pour les salariés. Les mesures d'accompagnement proposées peuvent être les suivantes :

- prise en charge des frais pour l'obtention du permis de conduire et pour l'achat d'un véhicule ;

- organisation de co-voiturages ;

- prise en charge des péages ;

- mise en place de navettes ou augmentation de leur capacité si le système est déjà en place ;

- indemnisation du temps de trajet supplémentaire ;

- augmentation des indemnités de frais de transport ;

- prise en charge des frais de garderie ;

- aide financière au déménagement ;

- aménagement d'horaires ;

- télétravail ;

- etc.

Les possibilités de restauration sur place feront également partie des problématiques à examiner par le CHSCT.

Concernant l'aménagement...

L'aménagement concerne la conception des nouveaux espaces de travail (bureaux individuels ou open space, implantation des services, nombre de postes de travail alloués à chaque service, etc.) ; le CHSCT devra s'interroger sur ce nouvel environnement, les moyens et l'organisation du travail.

Un avis motivé grâce aux experts

Pour rendre un avis motivé au projet de déménagement, le CHSCT pourra s'appuyer sur l'aide d'experts qui se chargeront de comparer les futures conditions de travail avec celles existantes et ainsi évaluer, pour lui, les effets du changement. Les expertises lancées par le CHSCT aussi bien sur la projet de déménagement que d'aménagement lui seront par ailleurs d'un grand soutien dans la négociation des mesures d'amélioration et de compensation.

Bien sûr, le rôle du CHSCT ne prend pas fin à l'issue de la procédure de consultation. Une fois le déménagement effectué, il devra rester à l'écoute des salariés et observer les nouvelles situations de travail au cas où des dysfonctionnements viendraient à apparaître.

Enfin, il ne faut pas oublier non plus de s'intéresser aux mesures qui seront prises à l'égard des salariés qui refuseront de suivre l'entreprise dans son projet de déménagement...

 

 

 

 

 

 

 

 

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