Surveillance des salariés au travail

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Deux arrêts récents de la Cour de cassation (Cass. Soc., 2 fév. 2011, n° 09-72.313 et n° 09-72.449), sur  les échanges de courriels entre salariés, nous amène ce trimestre à évoquer la surveillance et le contrôle des salariés par l’employeur. Dans les deux affaires jugées en février dernier, des salariés ont appris, à leurs dépens, que des messages électroniques échangés entre collègues au temps et au lieu de travail, et critiquant violemment la hiérarchie, peuvent mener à un licenciement pour faute grave.

Le tort des salariés ? Ne pas avoir indiqué le caractère privé de leurs messages, soit dans l’objet du mail, soit dans la dénomination du dossier d’archivage. Par conséquent, ces messages a priori personnels ont été considérés en lien avec leur activité professionnelle...

Jusqu’où l’employeur peut-il aller dans la surveillance et le contrôle de ses salariés ? Quel est le rôle du comité d’entreprise en la matière ? A découvrir, dans ce dossier...

Quel type de surveillance l'employeur peut-il exercer et par quel moyen ?

 

Type de surveillance

 

 

Moyen

 

 

 

 

 

 

Surveillance de l’outil informatique

 

 

 

 

Info :

L’utilisation d’internet au travail par les salariés

 

-> Temps passé par jour, sur Internet, par les salariés :

94 minutes contre 86 en 2009, soit une progression de 9 %.

 

Cette progression concerne davantage l’usage professionnel du web (qui passe de 28 à 35 minutes entre 2009 et 2010) que l’usage personnel (59 minutes contre 58 en 2009).

 

 

-> Nature des sites visités :

 

- Entre 8 h et 10 h : site d’actualités (17 % de consultations) et réseaux sociaux (20 % des consultations avec Facebook en tête de liste).

 

 

ADOPTION D’UNE CHARTE FIXANT LES CONDITIONS D’UTILISATION D’INTERNET ET DE LA MESSAGERIE

 

  • Mise en place de logiciels de surveillance des connexions des salariés : sites visités, temps passé, messages envoyés.
  • Filtrage de sites non autorisés : forum ou chat, accès à une boîte aux lettres électronique personnelle, etc.

 

Conditions particulières :

 

Sont présumés avoir un caractère professionnel :

 

  • Les connexions établies sur internet pendant le temps de travail
  • Les favoris référencés sur l’ordinateur mis à la disposition du salarié par l’entreprise
  • Les fichiers stockés n’affichant pas la mention « personnel »

Le caractère professionnel de ces éléments confère à l’employeur le droit de les rechercher sur l’ordinateur de son salarié afin de les identifier comme tels, voir de de les ouvrir en l’absence de ce dernier.

 

En revanche, l’employeur n’est pas autorisé à ouvrir les messages et/ou les fichiers nommés avec la mention “personnel” en l’absence du salarié. Seul en cas de circonstances exceptionnelles, l’employeur peut être

amené à ouvrir ces messages ou fichiers mais toujours en présence du salarié concerné.

 

La mise en place de logiciels de surveillance des connexions des salariés exige une déclaration auprès de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés), une consultation du CE et une information des salariés.

 

À SAVOIR

 

En général, l’employeur fait preuve de tolérance quant à l’usage d’Internet et de la messagerie à des fins personnelles. Il est du ressort du salarié de ne pas en abuser...


 

Type de surveillance

 

 

Moyen

 

 

 

 

Surveillance des communications téléphoniques

 

 

DÉCLARATION À LA CNIL

 

L’employeur doit déclarer, préalablement à sa mise en œuvre, tout traitement automatisé de données à caractère personnel. À défaut, il encourt une sanction pénale.

 

 

ÉCOUTES ET ENREGISTREMENT DES CONVERSATIONS

 

Ce mode de surveillance concerne exclusivement les lignes téléphoniques réservées à un usage professionnel et constitue un mode de preuve valable pour fonder un licenciement.

 

Conditions particulières :

 

L’employeur doit dûment avertir ses salariés qu’ils peuvent être placés sous écoute et, en cas d’enregistrement des conversations, il doit effectuer une déclaration auprès de la CNIL.

  

À SAVOIR

 

La vérification par l’entreprise du relevé des communications téléphoniques fourni par l’opérateur, sans en avoir informé les salariés, ne constitue pas un procédé de surveillance illicite (Cass. Soc., 15 mai 2001, n°99-42.937).

 

Fouille du salarié ou de son vestiaire

 

Un employeur ne peut surveiller ses salariés à leur insu.

 

L’employeur qui décide de mettre en œuvre un moyen de contrôle des salariés doit impérativement répondre à deux obligations sous peine de ne pouvoir utiliser les informations recueillies pour justifier une sanction disciplinaire ou un licenciement :

 

1. Informer le salarié (C. trav., art. L. 1222-4)

2. Consulter le CE (C. trav., art. L. 2323-32)

 

OUVERTURE DES SACS DES SALARIÉS

 

Vérification de leur contenu en cas de circonstances exceptionnelles.

 

Conditions particulières :

 

 

L’employeur doit obtenir l’accord du salarié et l’informer de son droit à s’opposer à la fouille et d’exiger la présence d’un témoin.

 

OUVERTURE DU VESTIAIRE DES SALARIÉS

 

Conditions particulières :

 

 

Se reporter aux cas et aux conditions prévus par le règlement intérieur de l’entreprise ; le salarié doit être présent ou avoir été prévenu.

 

Surveillance du salarié dans ses déplacements professionnels

 

RECOURS AUX SERVICES D’UN DÉTECTIVE PRIVÉ

 

À l’insu du salarié, le recours à un détective privé constitue un moyen de preuve illicite. Tout licenciement basé sur ce moyen est considéré comme abusif.

 

Type de surveillance

 

 

Moyen

 

La géolocalisation

 

Jurisprudence

 

 

L’employeur est libre de mettre en place des procédés de surveillance là où les salariés ne travaillent pas, comme les entrepôts de marchandises et les locaux de rangement

(Cass. Soc., 31 janv. 2001, n°98-44.290/Cass. Soc., 19 janv. 2010, n°08-45.092

 

LOCALISATION DES VÉHICULES PROFESSIONNELS VIA UN SERVICE INTERNET

 

Ce procédé informe du trajet effectué, des temps d’arrêt, de l’heure de départ et d’arrivée, de la vitesse des véhicules utilisés par les salariés

 

Conditions particulières :

 

 

Les conditions de recours à la géolocalisation sont strictement définies par la CNIL.

 

 

 

La biométrie

 

ENSEMBLE DES PROCÉDÉS DE RECONNAISSANCE AUTOMATIQUE D’UNE PERSONNE PAR CERTAINES DE SES CARACTÉRISTIQUES PHYSIQUES (empreinte digitale, dessin de l’iris, image du visage, géométrie de la main, etc.)

 

Conditions particulières :

 

L’employeur doit au préalable adresser une demande d’autorisation à la CNIL, par courrier.


Rôle du comité d'entreprise et des représentants du personnel

Logiquement, l’employeur doit consulter le comité d’entreprise sur la mise en place d’un dispositif de surveillance, avant d’en informer les salariés.

Trois points devront particulièrement retenir l’attention du CE :

  • Le respect par l’employeur des formalités administratives (déclaration à la CNIL, autorisation préfectorale) ;
  • La pertinence et la proportionnalité entre les moyens techniques utilisés et le but recherché par l’employeur (C. trav., art.L.1121-1) ;
  • Le respect de la vie privée des salariés quant aux moyens techniques utilisés et au but recherché par l’employeur.

Code du travail et jurisprudence

Lorsque le comité d’entreprise estime que le dispositif de surveillance porte atteinte de manière injustifiée à la vie privée des salariés, il peut se rapprocher des délégués du personnel pour leur demander de faire jouer leur droit d’alerte (C. trav., art. L. 2313-2). D’après un arrêt de la cour de cassation, du 10 décembre 1997 (n° 95-42.661), le DP peut en effet faire jouer ce droit d’alerte pour réclamer le retrait d’éléments de preuve recueillis par l’employeur contre le salarié par des moyens frauduleux.

Ne pas consulter régulièrement le CE peut constituer, pour l’employeur, un délit d’entrave.

 

 

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